ici, depuis quelques jours
cet ici, déjà depuis quelques semaines, quand le Chili
cet ici, donc, est de l’autre côté du Pacifique, c’est un ici où se parle l’espagnol, cette deuxième langue la plus parlée au monde — qui sera bientôt la première langue parlée aux Etats-Unis
si l’espagnol se parle ici, entre tous ceux qui y vivent, quelles que soient leurs origines, c’est évidemment parce qu’il y a eu occupation, et tout ce qui est venu avec l’occupation (c’est-à-dire tous les moyens efficaces pour l’emporter quand on occupe une terre). à part l’immense Brésil, occupé par d’autres, l’ensemble des terres émergées en-dessous des Etats-Unis ont une seule langue commune. qu’on soit métis, indigenas (c’est ainsi qu’ici quand on est indien-améridien) on se nomme, avec fièreté, ou descendant en majorité d’espagnols, etc. évidemment, par rapport à la manière dont la langue est parlée en Espagne, dont le castillan est parlé en Espagne, il y a pas mal de changements, d’autres mots, d’autres manières de dire. c’est ainsi une langue qui s’invente, à côté de l’ensemble des autres langues parlées par les indigenas
des langues complexes, qui disent ce qui est ici, quand l’espagnol, de fait, est en surface
vivre ainsi dans une langue de recouvrement, depuis que je suis arrivé sur ce continent immense. et c’est une dimension inédite et douloureuse, c’est-à-dire marcher sur un sol et respirer un air recouverts
pourtant, les noms de lieu, ici à México, parlent, hurlent la présence de l’autre langue, des autres langues, qui ne sont plus audibles que dans ces noms de lieux. anahuac, cuauhtémoc…
atoyac, xoco, tecoyotitla, tuxpan, huatusco, tlacotaplan, atlixco, cholula, yautepec, mazatlan, jojutla, pachuca, chapultepec, oaxaca, orizaba, zacatecas, tlalpan, mixcoac…
donc, il y a une langue par-dessus, une langue en même temps, comme partout, en somme
ici, comme ailleurs, la question serait : qu’est-ce que peut dire de ce monde cette langue en même temps. elle dit de son monde, c’est-à-dire comment elle est arrivée là, avec qui, quand, elle est arrivée, comme partout, avec les croix. il y a beaucoup de croix, visibles et invisibles
comme partout, des croix profondément ancrées, mais qui cohabitent
quand tout ainsi est recouvert, d’une manière ou d’une autre c’est recouvert, il faut donc s’enfoncer loin dans les terres, là où ça se déserte, là où pourtant ça pourrait, mais en général là où ça se déserte
il faut s’enfoncer, marcher ou rouler, et chercher derrière des traits, derrière, ce qui existe encore, pourquoi chercher ces traces, pourquoi chercher ces bribes, puisque rien ne
ces bribes comme des témoins encore en mouvement un peu, sans levier, mais ça bouge encore, qui sont du vivant terrestre, qui sont quelque chose d’une planète qui se souvient dans ces sons qu’elle a pu être lue et crainte, à un moment, qu’il y a eu dans ces sons humains un écho à ce qui, tout autour, quand les hommes et quand les hommes, non, ou pas encore
que chercher, ainsi, dans des endroits de plus en plus reculés, là où on ne parle plus et où pourtant on parle encore ? que chercher, comment faire émerger quelque chose, alors que ça ne peut désormais qu’être souterrain, voire étouffé, puisque plus rien d’autre ne compte que ce qui recouvre, sous des couches et des couches, plus rien ne compte que ce qui recouvre
qu’est-ce qui parle, ainsi, dans ces voix ?
dans ces langues que plus personne n’entend, ou presque
qu’est-ce qui parle dans le mapuzungun, le rapa nui au Chili, dans
l’amuzgo
le chatino
le chichimeca jonáz
dans le chinanteco
dans le chinanteco de lalana
et dans celui d’ojitlán
qu’est-ce qui parle dans le chocho
dans le ch’ol
le chontal
le cora
le cuicateco
dans le huasteco
dans le huave
dans le huichol
qu’est-ce qui parle dans l’ixil
dans le lacandón
dans le matlatzinca
dans le maya
dans le mazahua
dans le mazateco
et le mixe
et le mixteco
et dans le mixteco de la mixtes baja
dans le náhuatl
et l’otomí
dans le pame
et le popoloca
dans le popoloca de Oluta
et le purépucha
dans le tarahumara
et le tepehua
et le tlapaneco
et le tojolabal
et le totonaca
dans le triqui
dans le tzeltal
dans le tzotzil
dans le yaqui
dans le zapoteco
dans le zapoteco del istmo
dans le zoque
dans ces 42 langues parlées encore un peu (pour la grande majorité d’entre elles, à peine quelques personnes encore) dans l’état de Querétaro, à plus de 200 kms au nord ouest de CDMX (ciudad de México)
Querétato
domingo 7 enero 2018
y
el 12 de enero, encontrar Prudencio Merino Ramirez y Teresa López Bautista, de la communidad triqui, y grabadorarles hablan en triqui. gracias a Alejandro Vazquez
y con Macédonia Blas Florès, en hñäñho
y en Zapoteco, con Gloria Gallegos
el 13 de enero, sabado, a Amealco, con Maria, Vic y Samara
una lección de otomi, mirando el paisaje, con Guadalupe
y
con Guadalupe, gracias, María, para tu photo
aujourd’hui 14 janvier, retour à Améalco, cette fois avec Rosa Margarito Blas
après une description du paysage hier, le 14 apprendre les parties du corps
y
el texto en hñäñho
ya ‘ñoho bí munts’i ‘ra ya xeni ya t’oho
les hommes ramassent des fragments de montagnes
los hombres recogen fragmentos de montañas
bí käi mbo ja ‘ra ya däthe
descendent au fond des rivières
descienden en el fondo de los ríos
bí ne bí tsähmi ar ndähi ko ya nsa’ñe
cherchent à retenir l’air entre leurs doigts
procuran retener el aire entre sus dedos
bí hongi ‘ra ya zu’we mbo jar hai
ils cherchent des insectes dans le sol
buscan insectos en el suelo
bí hongi ‘ra ya mädo xäju, ‘ra ya nts’umexe,‘ra ya mexe, tangra mexe o dese mexe, zu’we nts’o dehe
ils cherchent des vers, des larves, des araignées (etc.)
buscan hacia, larvas, arañas
nu’bu ar put’uzá, ‘yomunxui
cuando la lechuza, de noche
yá wa jo’mi ko ar pa
leurs pieds sont couverts de temps
sus pies son cubiertos del tiempo
yá xida jo’mi ko ar do’u
leurs paupières sont couvertes de sel
sus párpados son cubiertos de sal
ya zá ‘bui hingi ‘ñäni, ne ya zá bi ndätä ‘rats’i ja ya ‘ñoho
immobiles, les arbres poussent à travers eux / en eux
inmóviles, los árboles crecen en ellos / a través de ellos
ya zezni nxangu’yu mbo jar yá ‘ye
les (liste de plantes) prennent racine dans leurs mains
( lista de plantas) echan raíces en sus manos
Ya ‘ñoho bi xoki yá pulmon ar njuxuhñä madui ja ya hai
ils ouvrent leurs poumons aux souffles souterrrains
abren sus pulmones a los alientos invertidos (bajo tierra)subterreneo
bí njuxuhñä ar asufre ne ar xät’ä
ils respirent le souffre et la poussière
respiran el azufre y el polvo
ne bí xa hño mbo ja ya bongi
et fouillent dans les débris/restes/restos/sobrantes
y buscan/hurgan en los pedazos
mbo ja ya xeni xibujä, mbo ja ya xeni t’ulo bojä, mbo ja ya xeni dätä bojä
dans les morceaux de métal, de voitures, de camions
en los pedazos de metal, de coches, de camiones
mbo ja ya bongi nguu ne o ya ‘ñuu
dans les débris de maisons et entre les rails
en los pedazos de casas y entre los carriles
ya ‘ñoho ma ‘ra nsani nthi jar hai
les autres hommes volent loin au-dessus du sol
otros hombres vuelan lejos por encima del suelo
ya ‘ñoho xí ‘rats’i ya ngäts’i ximhai ya mäteryal
ils ont traversé les horizons de matières
atravesaron/ cruzaron los horizontes de materias
ya ‘ñoho hingi pädi
sans comprendre (n’ont pas compris)
non comprendieron
ne ya ‘ñoho bi ‘yo ko ya mi’ño
et ils marchent avec les coyotes
y andan con los coyotes
nu’bu ar hai hñege
quand la terre s’écarte
cuando la tierra apartarse
ya ‘behñä nuwa sige hokujat’i
ici, les femmes continuent à broder
las mujeres de aqui siguen bordeando
‘ramuts’u
peu à peu
poco a poco
yá ñäni bí udi pa da fädi ‘ra ya ‘ñu / the ar pomuhñä
leurs gestes font apparaître / rendent visible des lignes de sens
sus gestos hacen visible lineas de sentido
ne ar mäteryal tsaya
et la matière se calme
y la materia se calma
‘nar t’olo ora
pour un temps
por un tiempo/rato
inattendu, à ce point issu de
et après avoir travaillé à le répéter et à le dire avec Miriam Martinez benitez, étudiante hñäñho de Selene Hernandez,
à San Ildefonso, domingo 21 de enero
et
ayer 25 de enero, museo Tamayo, Mexico df, algunos minutos antes de la performance, con Felicitas Bermú, Gerardo González Everaldo Suárez, Claudia Arellano Ruiz, y Rebeca Ramírez, que vienen à proposito